Sept mois et demi. On commence l’alimentation solide. Il a tellement changé, d’un coup presque. Nous vivons dans une unité de temps qui se dilue, nous laissant toujours sur le bas-côté du chemin, surpris de se retrouver si vieux avec des regrets. Un bébé n’attend pas le bon moment, le printemps, le soleil, l’argent qui..., un bébé grandit, se développe et nous surprend tous les jours par ses progrès. Nous en sommes encore à notre vie d’avant quand soudain, il prend sa place en babillant, exigeant de bouger, découvrir, toucher, en prenant notre temps, notre coeur et finalement en vidant le sablier du temps qu’on venait pourtant juste de tourner quand, en contemplant les deux petites barres sur le test de grossesse, on découvrait qu’on allait devenir papa et maman...
Elliot a deux dents, deux yeux grands ouverts, deux mains qui saisissent tout et surtout ce qu’on ne remarquait plus, deux jambes qui gigotent avec vigueur quand on le porte comme pour nous dire plus vite, encore, par là... Il a une voix plus grave qui sonne dans la maison de bonne heure (très bonne heure) le matin, un sacré coup de rein associé à un système efficace de propulsion vers l’arrière quand, couché sur le dos dans notre lit il remonte et se cogne contre le mur faute de tête de lit. Il a un sourire charmeur et un petit air timide qui séduit les caissières, une avidité qui le fait plonger, bouche et mains en avant sur un tas de truc, une faculté de se tortiller pour se soustraire au bras qui le retient, un nez plein impossible à nettoyer...
Le décrire, je ne m’en lasse pas et suis littéralement amoureuse. Je me plie en quatre pour satisfaire ses désirs, l’amuser, le soigner, le laver, le changer, le promener. Je guette ses sourires, ses regards pleins d’admirations, ses babillages pleins d’intonations, ses mimiques craquantes... Ce n’est pas de la générosité, juste de l’amour.